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3. La valence


Le verbe peut être entouré de toutes sortes de compléments : le complément d’agent au passif, une grande variété de compléments circonstanciels, voire un attribut, et des adverbes qui en modifient le sens.

Mais ce qui nous intéresse ici, ce sont les compléments qui ont un rapport direct avec la valence du verbe. En effet, les verbes ont une façon particulière de s’insérer dans la phrase et pour constituer le syntagme verbal, due au fait que chacun possède sa valence, en fonction de sa signification.

Nous allons nous pencher sur ce phénomène dont l’importance est primordiale, car de la valence dépend la construction de la phrase.


3.1. Le verbe et sa valence

3.1.1 Remarque préliminaire

Il est d’usage, lorsque l’on parle des verbes, de distinguer 3 sortes :

  • Les verbes intransitifs qui n’admettent aucun complément d’objet : Il glande. (il ne fait rien)
  • Les verbes transitifs, qui admettent des compléments d’objets, et que l’on nomme :
    • Transitifs directs, lorsqu’ils admettent un objet direct, qui se construit sans préposition : Elle regarde la télévision.
    • Transitifs indirects lorsqu’ils admettent un objet indirect, qui se construit avec préposition : Nous pensons à vous.

Vient ensuite un complément d’attribution, qui vient détruire ce bel ensemble, étant donné qu’il est introduit par une préposition, le plus souvent à, mais que l’on trouve derrière les verbes transitifs directs, ce qui fait un peu désordre. Ils s’emploient dans un trio constitué d’un sujet, d’un cod souvent inanimé, qui est attribué au troisième du trio, que l’on nomme complément d’attribution. Ainsi :

L’étudiante écrit une lettre à son ami.

Le trio est constitué :

  • du sujet ➜ l’étudiante,
  • du cod ➜ une lettre, et
  • d’un complément d’attribution ➜ ami.

Et la lettre passe du sujet au complément d’attribution.

Malheureusement, il existe des cas où c’est l’inverse qui se produit : il a volé un billet de 50 € à sa mère. Ici, le complément d’attribution est dépouillé, et l’objet est attribué au sujet. Il y a donc au minimum doute sur la dénomination du complément.

De plus, la grammaire ne sait trop que faire de l’attribut, qu’il soit du sujet ou du cod, alors qu’il fait bien partie d’une valence, mais qui peut avoir pour noyau aussi bien un nom (il est professeur) qu’un adjectif (il est travailleur).

Enfin, la dénomination des compléments est fallacieuse, étant donné qu’elle laisse supposer que tout vient du complément, qui est direct, ou indirect, alors que la décision dépend du verbe :

Elle se rappelle son enfance.
Elle se souvient de son enfance.

Il s’agit là en fait de deux phrases qui décrivent la même réalité : le même sujet, le même complément, deux verbes synonymes, et pourtant, son enfance est objet direct dans la première phrase, et objet indirect dans la deuxième. Mais la différence vient uniquement de la construction du verbe : on se rappelle qc, mais on se souvient de qc.

Tout dépend de la valence du verbe utilisé, et c’est pour cela que nous allons bâtir un système cohérent autour de l’idée de valence du verbe.

3.1.2 Principe

Si vous avez fait un peu de chimie, vous savez ce qu'est une valence. Rafraichissons les mémoires défaillantes:

L'oxygène a une valence 2.

Dans une molécule d'eau, H2O, l'atome d'oxygène a une valence 2, car il peut accrocher à la fois 2 atomes d'hydrogène, chacun de ces atomes ayant une valence égale à 1.

Pour dire les choses plus banalement, O a deux bras, alors que H n'en a qu'un. La valence explique donc le nombre de liens qu'il peut y avoir entre un atome et d'autres.

Lorsqu'il s'agit d'un verbe, la valence décrit la façon dont il est relié à ses compléments, c'est-à-dire aux groupes nominaux ou verbaux qui se rapportent à lui.

Par exemple:

Pascal écrit une lettre à Corinne.

Le verbe écrit établit un rapport entre le sujet Pascal, un objet lettre et une certaine Corinne.

La valence du verbe est: écrire qc à qn.

Le verbe écrire admet donc un complément relié sans préposition, qc, et un complément supplémentaire qn relié par l'intermédiaire de la préposition à.

On notera que c’est le verbe qui détermine les moyens de relier les compléments, mais en aucun cas les compléments eux-mêmes.

3.1.3 Les différentes sortes de valences

Il y a quatre sortes de valences, que nous appellerons chacune Val , et que nous ferons suivre du nombre de compléments liés au verbe, qui va de 0 à 3 :

Val0 : le verbe n’admet pas de complément dans sa valence. Il se suffit à lui-même. Il est intransitif.

valence 0

Ex : Roger ronfle.

➜ La valence est donc vide : ronfler Ø.

Cela n’empêchera pas l’emploi de compléments circonstanciels, lesquels, comme on le sait, décrivent les circonstances dans lesquelles a lieu l’action, mais qui n’ont rien à voir avec la valence du verbe :

Ex : Roger ronfle toute la nuit, couché sur le dos.

Toute la nuit est complément circonstanciel de temps, et couché sur le dos complément circonstanciel de manière.

Val1 : le verbe admet un complément dans sa valence. Il établit un lien entre le sujet et le complément dans sa valence. Il est dit transitif. Ce lien peut être de deux sortes.

valence 0

Le verbe établit le lien avec le nom, le pronom ou l’infinitif sans aucune préposition. La valence est alors : verbe qc/qn/vb.

Mon chat aime sa gamelle. (Aimer qc)
Mon chat aime sa maîtresse. (Aimer qn)
Mon chat aime dormir. (Aimer vb)

Notez que l’emploi de qc/qn/vb signifie que le verbe peut avoir pour complément un non animé (qc = la gamelle), un animé (qn = la maîtresse) ou un verbe à l’infinitif (vb = dormir).

Le verbe aimer peut avoir les trois sortes, mais d’autres verbes peuvent très bien n’en admettre que 2, voire 1. Tout dépend du sens du verbe.

Par exemple, pour un sujet humain, la valence du verbe manger peut être qc, mais pas qn, sauf pour un sujet cannibale. On écrira alors : manger qc.

Mais pour un fauve, on pourra écrire : manger qc/qn, qui signifiera que l’animal peut manger des non animés, aussi bien que des animés.

Nous noterons ce genre de complément CV(-), ce qui voudra dire : complément (=C) dans (le cadre de) la valence (=V), relié sans préposition (-). C’est ce que l’on appelait un C.O.D.

Le verbe établit le lien avec le nom, le pronom ou un infinitif au moyen d’une préposition. La valence est alors : verbe à qc/qn/vb.

Elle parle de ses vacances / de son ami / de se marier.

(Parler de qc/qn/vb)

Nous noterons ce genre de complément CV(de), ce qui voudra dire : complément (=C) dans la valence (=V), relié par la préposition (de). C’est ce que l’on appelait un C.O.inD.

Elle pense à ses études / à son ami /à déménager.

(Penser à qc/qn/vb

)

Nous noterons ce genre de complément CV(à), ce qui voudra dire : complément (=C) dans la valence (=V), relié par la préposition (à). C’est ce que l’on appelait aussi un C.O.inD.

Val2 : le verbe admet deux compléments dans sa valence.

Il établit un lien entre le sujet et les deux compléments dans sa valence. Il est dit, lui aussi, transitif. Ce lien peut être de deux sortes.

valence 0

Le verbe établit le lien avec le premier complément sans préposition, le deuxième étant relié par une préposition.

Ex : Julie raconte son mariage à ses amies.

La valence est ici : raconter qc à qn.

Le premier complément est du type CV(-), donc, complément dû à la valence relié sans préposition. Raconter qc ➜ CV(-).

Le deuxième est du type CV+(à), donc, complément dû à la valence relié par la préposition à.

Raconter qc ➜ CV(-) à qn ➜ CV+(à).

important Remarque : le complément CV(à) arrivant après un complément CV(-) correspond à ce que l’on appelait un complément d’attribution. Pour montrer qu’il arrive en plus d’un autre complément, nous le noterons CV+(à), et nous dirons que c’est un complément (=C) dansla valence (=V), arrivant en plus (+) relié par la préposition à =(à).

Raconter qc ➜ CV(-) à qn ➜ CV+(à).

Pourquoi se donner tant de peine ? Parce que le fait qu’il appartienne à cette catégorie nous oblige à en tenir compte dans le choix des pronoms personnels, mais aussi dans la détermination de la place des pronoms personnels. Si cela ne vous dit rien, c’est parce que vous n’avez pas encore étudié le chapitre consacré aux pronoms personnels.


Le verbe établit le lien avec chacun des deux compléments au moyen d’une préposition. La plupart du temps, les deux prépositions sont différentes.

Ex : Julie parle de son mariage à ses amies.

La valence est ici : parler de qc à qn.

Le premier complément est du type CV(de), donc, complément dans la valence relié par la préposition de.

Parler de qc ➜ CV(de).

Le deuxième est du type CV+(à), donc, complément dans la valence relié par la préposition à et s’ajoutant au CV(de).

Parler de qc ➜ CV(de) à qn ➜ CV+(à).

On trouvera dans cette catégorie :

Le président annonce une baisse des impôts aux Français.

➜ annoncer qc { CV(-) = une baisse des impôts} à qn { CV+(à) aux Français}.

N’oubliez pas que dans qc à qn ou qn à qn le CV(à) doit comporter le signe +, qui rappelle qu’il arrive en plus de l’autre complément CV(-), et qu’il faudra le traiter autrement que les CV(à) lorsqu’on le remplace par un pronom personnel.

Julie parle de déménager à ses amis.

➜ Parler de vb {CV(de) = de déménager} à qn { CV(à) à ses amis}

Vous envisagez de passer vos vacances avec des amis.

➜ Envisager de vb {CV(de) = de passer vos vacances} avec qn { CV(avec) avec des amis}

Val3 : Le verbe admet 3 compléments, ce qui rend la relation entre le sujet et les trois compléments plus complexes.

Ex : La patronne donne une lettre à traduire à son interprète.

valence 0


La valence est ici : donner qc à vb à qn.

Le premier complément est du type CV(-), donc, complément dû à la valence relié sans préposition. donner qc ➜ CV(-).

Le deuxième complément est du type CV(à).

Valence : donner qc ➜ CV(-) à vb CV ➜ (à).

Le troisième est du type CV+(à), dans la valence qc/qn à qn/qc donc, complément dû à la valence relié par la préposition à arrivant en plus d’un complément CV(-), que nous devons donc noter CV+(à).

La valence finale sera : Donner qc ➜ CV(-) à vb ➜ CV(à) à qn ➜ CV+(à).

➜ Donner qc { CV(-) = une lettre} à vb { CV(à) = à traduire} à qn { CV+(à) à son interprète}.

3.1.4 Cas des verbes d'état

➜ Il existe des verbes qui collent une étiquette au sujet dans une valence de type Val1. Cette étiquette s’appelle attribut.


attribut du sujet

Cet attribut du sujet peut contenir un nom ou un pronom, ce qui le rapproche du complément, mais aussi un adjectif, ce qui en fait quelque chose de particulier.

Il est charcutier.

➜ être qc { AV(-) = charcutier}

Elle est travailleuse .

➜ être adj { AV(-) = travailleuse}

La valence sera donc : verbe d’état qc/adj

attribut du CV(-)

C’est pour tenir compte de cette caractéristique particulière que nous garderons le nom d’attribut. Mais comme le verbe possède une valence, nous noterons cet attribut AV(-), ce qui voudra dire : attribut (=A )dû à la valence (=V), relié sans préposition (-).

➜ Mais il existe aussi des verbes à valence Val2 qui collent une étiquette ( nom ou adjectif) sur un complément de type CV(-) ou CV(prép).

Cette étiquette est donc une autre forme d’attribut, celle que l’on appelait autrefois attribut du cod, même si ce cod était parfois indirect.

Voici quelques exemple de ces verbes : trouver qn/qc adj, tenir qn/qc pour qn/qc/adj appeler qn/qc qn/qc/adj :

Je trouve Edith pâle.

trouver qn { CV(-) = Edith} adj { AV(-) = pâle} .

Il trouve Jacques grand prince.

trouver qn { CV(-) = Jacques} qn { AV(-) = grand prince} .

Nous trouvons ce fromage excellent.

trouver qc { CV(-) = ce fromage} adj { AV(-) = excellent} .

Je le tiens pour bête.

tenir qn { CV(-) = Edith} pour adj { AV(pour) = pour bête} .

Elles le tiennent pour un imbécile.

tenir qn { CV(-) = le} pour qn { AV(pour) = pour un imbécile} .

Tu tiens ce livre pour un coup de génie.

tenir qc { CV(-) = ce livre} pour qc { AV(pour) = pour un coup de génie} .

Lui, il tient ce livre pour osé.

tenir qc { CV(-) = ce livre} pour adj { AV(pour) = pour osé} .

Elle m’a traité d’idiot.

traiter qn { CV(-) = m’} de qn { AV(de) = d’idiot} .

Je l’ai traitée de tigresse.

traiter qn { CV(-) = l’} de qc { AV(de) = de tigresse} .

L’attribut se comporte donc comme un complément. C’est sa nature d’étiquette, employée avec des verbes particuliers, qui nous oblige à le traiter à part, même si, le plus souvent, il se mélange, dans des valences à partir de Val2, à des compléments CV() avec ou sans préposition.


3.1.5 Tableau des valences

Valences

exercice

Maintenant, faites un exercice :identifier la valence :

exercice

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